Boeing stocke ses B 737 MAX, oui mais « les murs ne sont pas extensibles »

Rédigé le 16/03/2019

LA TRIBUNE – Par Fabrice Gliszczynski  |  16/03/2019

(Crédits : © David Ryder / Reuters)

Avec l’immobilisation des 737 MAX, Boeing a arrêté les livraisons d’avions mais continue de les produire. Si cette situation devait durer plus de deux mois, Boeing n’aurait pas la place suffisante pour stocker les appareils et risquerait de transférer le stockage des pièces (et des ses coûts) aux fournisseurs. Sans préjuger du résultat de l’examen des boîtes noires, Boeing ntend modifier d’ici à une dizaine de jours le système anti-décrochage MCAS, mis en cause ans l’accident du 737 MAX 8 de Lion Air en octobre dernier, lequel présente des similitudes avec l’accident d’Ethiopian Airlines le 10 mars dernier.

Les fournisseurs du Boeing 737 MAX sont sous pression. Certes, même si les livraisons d’avions sont suspendues après l’accident d’Ethiopian Airlines le 10 mars dernier, la production est maintenue. Boeing entend donc continuer à assembler les avions et introduire la solution à ses problèmes une fois qu’ils auront été clairement identifiés et que la façon de les résoudre validée. Ainsi, en maintenant la production, Boeing maintient ses achats auprès des fournisseurs. Une bonne nouvelle pour ces derniers. Mais pour combien de temps ?

  1. 52 avions produits par mois

Car les capacités de stockage de Boeing dans son usine de Renton, près de Seattle ne sont pas extensibles. Selon nos informations, elles permettraient de stocker une centaine d’appareils, l’équivalent de deux mois de production, puisque Boeing construit 52 B737 MAX par mois. Interrogé par La Tribune, Boeing n’a pas fait de commentaire. La veille, l’avionneur avait confié à l’AFP qu’il cherchait de nouvelles capacités de stockage.

  1. Le risque d’un transfert du stockage et de ses coûts aux fournisseurs

Aussi, selon des observateurs, si l’interruption des livraisons est amenée à durer, Boeing risque de transférer une partie du stockage chez les fournisseurs, lesquels devront également trouver de la place, avant de transférer à leur tour à leurs fournisseurs une fois leur capacité de stockage arrivée à saturation. Si cette problématique n’en est pas une pour les producteurs de petites pièces, elle l’est pour le motoriste CFM International, détenu à parité par General Electric et Safran. Interrogé Safran n’a pas indiqué combien de moteurs il pouvait stocker.

  1. Modification d’ici à 10 jours du système anti-décrochage

La durée de la suspension des vols est donc cruciale. On en saura plus quand les boîtes auront parlé. Le Bureau Enquêtes Analyses (BEA) a commencé à les décrypter hier.

« L’enquête (…) requiert une analyse minutieuse et un temps considérable pour parvenir à des conclusions concrètes », a déclaré ce samedi la ministre Dagmawit Moges au cours d’une conférence de presse à Addis Abeba.

Pour autant, selon l’AFP, sans attendre le résultat de leur examen, Boeing entend modifier d’ici à une dizaine de jours le système anti-décrochage MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System) mis en cause dans l’accident du 737 MAX 8 de Lion Air en octobre dernier, lequel présente des similitudes avec l’accident d’Ethiopian Airlines qui a fait 157 victimes le 10 mars dernier. Dans les deux cas, l’avion était neuf et s’est écrasé peu de temps après le décollage et les appareils ont connu des montées et des descentes irrégulières juste après le décollage.

Les premiers éléments de l’enquête de l’accident de Lion Air ont mis en cause un dysfonctionnement sur le « MCAS », et plusieurs pilotes américains ont également rapporté avoir été confrontés à un dysfonctionnement de ce dispositif.

Le MCAS n’existe pas sur les B737 classiques. Ils ont été ajoutés sur la version remotorisée MAX équipée de moteurs plus lourds. Ce système, qui fait piquer du nez l’avion pour éviter un décrochage, est censé se déclencher en cas de sortie du domaine de vol, mais semble néanmoins se déclencher également quand l’avion est dans les limites du domaine de vol en raison de mauvaises données reçues. Selon un pilote, ceci peut venir d’un dysfonctionnement des sondes d’incidence (AOA, Angle of Attack sensor) qui envoient de mauvaises informations de vitesse et d’incidence au logiciel, ou par une défaillance du système de remontées des données.

« Après l’accident de Lion Air, Boeing avait publié une consigne demandant aux pilotes confrontés à des problèmes d’incidence ou de vitesse de couper les « trim » pour reprendre l’avion en manuel et se poser le plus rapidement possible. Les « trims » font bouger le plan fixe horizontal de la gouverne », explique à La Tribune un pilote.

La FAA, le régulateur aérien américain, a demandé à Boeing  modifier ce logiciel au plus tard en avril. La solution serait prête et la modification prendrait environ deux heures par appareil, a-t-elle encore ajouté. D’après les estimations des analystes financiers, ce correctif reviendrait à environ deux millions de dollars par appareil, soit une facture de moins d’un milliard au vu du nombre de 737 MAX en circulation (371). Reste à savoir s’il s’agit ce logiciel défaillant est à l’origine des accidents ou s’il en est l’unique cause.